J'ai toujours beaucoup aimé Thanksgiving, cette fête qui amène un climat si particulier dans la ville, avant et pendant, où des déplacements se font dans tout le pays pour rejoindre la famille éloignée, et où nos amis américains se sont toujours assurés que nous n'étions pas seuls pour ce jour particulier.
Fête non commerciale, sans cadeau, où autour de la dinde, chacun remercie publiquement qui doit être remercié: les enfants remercient les parents de leur avoir payé leurs (chères) études, les juifs remercient le pays qui les a accueillis aux heures noires du nazisme, les malades remercient ceux qui les ont soignés, bien sûr les invités remercient leurs hôtes... Tout en sachant bien que c'est une fête de Caucasiens dont les ancêtres ont été aidés par les Natives et que les autres minorités ne se sentent pas forcément concernés par cette fête de de Gringos, j'ai toujours été émue par Thanksgiving.
Et puis le lendemain, j'attends amusée le Black Friday, ce jour où la société de consommation reprend ses droits avec un effet de rebond grâce à des promotions annoncées depuis des semaines, où avant l'ouverture des queues se forment devant les grands magasins et où on court vers les objets convoités, repérés à l'avance, avec parfois quelques pugilats.
L'année dernière, une petite faille s'était déjà ouverte avec une enseigne qui avait ouvert le soir de Thanksgiving. Et cette année, le phénomène s'est accentué, plusieurs chaînes s'y sont mises, non plus à 20 heures, mais à 18... peut-être pour compenser les ventes en ligne qui ont elles aussi leurs promotions. Le commercial a créé une brèche.
Je n'ai pas envie d'imaginer la dégustation de la dinde, des brocolis et de la purée, et de la tarte au potiron bousculée par l'idée des "affaires à faire". J'essaie de me dire que ce Black Friday permet aux personnes non concernées par Thanksgiving de profiter de leur jour de congé à leur façon.
Mais tout de même, j'ai peur que le phénomène s'étende d'année en année et atteigne le cœur de cette fête si particulière.